samedi 24 mars 2007

Qui soigne-t-on avec les ordinateurs ?


L’Inventaire des Systèmes d’Informations de la Santé (ISIS) et la recherche de l’état de l’art informatique sont aujourd'hui au cœur des débats qui animent le secteur hospitalier du Grand Duché de Luxembourg.
Face au nombre toujours croissant de patients à soigner, à la recherche permanente de la perfection technique, aux besoins grandissants de traçabilité, à l’exigence légitime de la protection des données personnelles et médicales, l'organisation et le fonctionnement de l’hôpital ont vu se développer de nouveaux défis de gestion. Pour relever ceux-ci, les messages politiques de tous horizons nous présentent l'outil informatique comme l’outil imparable.
En France, Xavier Bertrand, Ministre de la Santé, a présenté en février dernier son plan Hôpital 2012 qui met l’accent sur les systèmes d’information hospitaliers. « Je veux que les établissements soient complètement numérisés » … « c’est maintenant que nous devons prendre ce virage» déclare-t-il dans le journal La Tribune du 7 février 2007.
La balle serait-elle dans le camp des informaticiens ?

La monté en puissance de l’informatique dans le secteur hospitalier est notable sur ces cinq dernières années. Le métier a, quant à lui, également évolué. Les projets administratifs laissent la place à des projets visant les soignants. Ce rapprochement du cœur de métier implique un besoin de tenir de plus en plus compte des problèmes et des particularités organisationnels des services et métiers concernés par une informatisation.
Certains veulent laisser croire que l'informatique parviendra, à elle seule, à soigner des problèmes organisationnels alors que les professionnels s’épuisent à les résoudre sur papier. N’avons-nous tous pas rencontré des tentatives locales de changement dont l’effet final, malgré des efforts considérables, n’est que très sensible voire inexistant ? Au-delà des luttes intestines Administration-Soins-Médical, la volonté (souvent louable) de ces gens pleins d’illusions est de mettre enfin en place une solution « qui tourne » ; ils rêvent des logiciels parfaits que présentent les commerciaux. Mais malheureusement l'informatique n'est pas la panacée, la "baguette magique" qu’il suffit de pointer sur un département pour résoudre ses problèmes. Il faut analyser les véritables causes profondes de ces derniers. Cela commence en répondant à trois questions : Que changer ? Vers quoi changer ? Comment changer ?
Un support méthodologique s’impose. Quoi de mieux qu’une approche de résolution de problèmes tout à fait analogue à l’approche des cliniciens pour le traitement des patients (lire à ce titre le livre[1] de Burton-Houle qui exploite la Théorie des Contraintes) ?
Si nous avions à décrire l’ensemble du processus suivi par un clinicien, nous obtiendrions à peu près :

  1. Diagnostic : connaître les symptômes. Un clinicien commence par dresser une liste des symptômes observables et utilise les causes-effets pour rechercher les causes sous-jacentes de chacun d’eux et déterminer l’affection ou le problème principal.

  2. Conception d’un plan de soins : en considérant que le patient qu’il soigne est unique, un plan de soin est établi. Ce plan va cibler avant tout l’affection mais va également prendre en compte les autre choses qui doivent être considérées tout au long des soins pour guérir et pour assurer que le traitement fonctionnera (le médecin prescrit par exemple du repos au lit). Tous les effets secondaires du traitement sont identifiés et les moyens pour les éviter ou limiter deviennent des éléments importants du traitement (par exemple, soulager l’estomac lors de la prise d’anti-inflammatoires).

  3. La prise du traitement : en considérant que chaque patient est unique, un plan est développé pour déterminer comment mettre le traitement en route.

Ce bon sens médical nous rappelle qu’il est bien essentiel de confirmer que la solution (informatique) entrevue pour une problématique va bien amener une véritable amélioration. Cela est d’autant plus vrai que le lancement d'un projet informatique demande avant tout du courage organisationnel. Il faut remettre à plat des pratiques traditionnelles et des habitudes de gestion. Il ne faut pas hésiter à envisager de nouveaux modes de fonctionnement.

Le succès d'un projet informatique relève d’une complicité étroite entre l’organisationnel, le fonctionnel et la technique, c'est-à-dire un engagement humain fort. Ce changement se gère dans le temps. Il doit permettre d’installer de nouvelles utilisations naturelles dans les pratiques de travail quotidiennes.


L'informatique Métier dans le Secteur de la Santé au Service de la Performance et de la Qualité est à ce prix. C’est le thème de la conférence organisée le 17 avril prochain au MEDETEL (Foires Internationales à Luxembourg). Une présentation lors du séminaire CRP-Santé me permettra de répondre a la question : dans un hôpital, « qui soigne-t-on avec les ordinateurs : le patient ou l’informaticien ? ». Amusé, j’entends déjà certains propos « c’est le discours d’un patient modèle et d’un informaticien averti…qui se porte bien ». Je devrai donc rappeler que, si je place un ordinateur au milieu d’une unité de soins, sans concept organisationnel et fonctionnel, nul doute qu’il va rendre malade bon nombre de professionnels du secteur santé !



[1] Burton-Houle, T.2001. The Theory of Constraints and the Thinking Process : A brief introduction to TOC. New Haven, Conn.:Avraham Y. Goldratt Institute

mardi 6 mars 2007

An Inconvenient Truth

C’est un show à l’américaine qu’a offert Al Gore lors de la conférence « Repères » de la Dexia Bil, tenue hier au Grand Théâtre de la Ville de Luxembourg. L’ex-vice Président des Etats-Unis était invité à présenter son film ‘An Inconvenient Truth’ qui porte sur le réchauffement de la planète et ses conséquences désastreuses.


Pendant près d’une heure et demie, utilisant des images fortes et des concepts simples, Al Gore a brillé dans un exposé qui ne laissait pas de place à l’improvisation. Posant ses arguments sur d’incontestables comptes-rendus scientifiques, il a présenté une machine remarquablement bien huilée. Elle lui permet de faire prendre conscience à tous que notre planète est en danger si on ne réagit pas dans l’urgence en introduisant des dynamiques de changement de comportement des Etats et des peuples.
On ne peut que saluer une initiative d’un représentant de la nation la plus impliquée dans la dégradation de l’environnement même si certaines connotations politiques ‘démocrates’ ne doivent pas nous rendre dupes à quelques mois des élections américaines…

Proche de sa conclusion, rappelant que les calligraphies asiatiques représentent généralement un concept ou une idée, Al Gore précise que le mot « crise » se représente par deux sinogrammes juxtaposés : le premier désigne le danger par contre le second symbolise l’opportunité. L’ex-vice Président invite le monde à réagir et à saisir cette dernière chance avant qu'il ne soit définitivement trop tard.